Qui sont ces trois profanes, ces trois
vedettes ? Ce sont Ricardo Larrivée, Pierre Thibault et Pierre Lavoie. Le
premier est connu pour ses talents de cuisiniers et de communicateur, le second
est un architecte de renom et le troisième est connu pour encourager l'activité
physique. Les trois sont des personnes estimées dans notre société. A priori, cependant,
il n'y a rien qui les qualifie pour repenser l'éducation, et seul Pierre
Thibault peut offrir des conseils pertinents pour repenser l'aménagement des
écoles afin de donner aux enfants le goût d'apprendre. À la condition qu'il
écoute les enseignants. C'est quand même une drôle de lubie que
celle-là. Le ministre de l'éducation a décidé d'avoir recours à des vedettes
pour se faire faire une petite Commission Parent 2.0. C'est, bien sûr,
ridicule.
Au-delà des vœux pieux et des bonnes
intentions et après avoir visité les écoles de pays réputés comme la Finlande, nos
trois profanes ne nous diront pas grand-chose de plus que ce que nous ne
connaissons pas déjà. Ils vont, sur l'école, réinventer le bouton à quatre
trous. Nous savons déjà ce qu'est un bouton à quatre trous. De là provient le
malaise que beaucoup éprouvent devant cette dernière trouvaille
gouvernementale.
Dans tout l'énorme ministère de l'éducation
comme dans toutes les universités où on forme des enseignants et dans les
commissions scolaires qui assurent au jour le jour avec les enseignants le
travail d'enseignement au ras des pâquerettes, dans les classes, il faut donc
conclure que le gouvernement n'a pas su trouver les ressources intellectuelles
et créatrices pour innover et repenser l'école québécoise.
Disons, en étant très charitables, que
cette initiative spectaculaire n'est pas de nature à renforcer la confiance du
monde de l'éducation en ses propres capacités. De plus, elle accrédite
l'impression qu'à peu près n'importe qui peut faire n'importe quoi dans
l'instruction des enfants. Ce n'est pas fort fort… C'est même insultant pour les
enseignants et le milieu. La critique des syndicats n'est pas sans fondements,
je le répète.
Pièce de stratégie
Pour comprendre ce geste du gouvernement,
il faut d'abord se dire que nous sommes à 18 mois de la prochaine élection.
Dans le budget Leitao de la semaine dernière, déjà la distribution des bonbons a
commencé. Également, une solide campagne publicitaire gouvernementale est en
marche. En planifiant à l'avance la prochaine campagne électorale, le
gouvernement ne comptera pas sur les enseignants qui, de toute façon, vont
disperser leurs votes entre plusieurs partis politiques surtout dans
l'opposition. Le gouvernement, qui a encore un budget à déposer au printemps
2018, va continuer de chercher à plaire au public en général en peaufinant ses
stratégies et ses informations.
Face à une opposition plus divisée que
jamais, le gouvernement tablera sur un certain contentement en raison de ses
investissements «judicieux» pour redonner aux Québécois une partie, sinon la
totalité de ce qu'il a imposé comme restrictions aux augmentations de budget,
ce que le langage courant a appelé, à tort, des coupures.
Que trois personnes respectables, connues
et admirées du public aient accepté de se pencher sur l'éducation et les écoles
est un geste habile de propagande politique qui a déjà sûrement marqué
positivement beaucoup d'esprits au Québec, en dehors des cercles plutôt restreints
des médias et de l'opposition.
Il restera au gouvernement, d'ici la fin de
l'automne, à annoncer une couple de coups d'éclat de ce genre pour continuer à
frapper le clou de sa bonne gouvernance. Bien sûr, ce gouvernement est fragile,
au plan éthique, mais il demeure uni. L'opposition, en Chambre et dans la rue,
n'a que des mots à lui opposer, et on ne sait pas très bien qui l'écoute
encore.
Les trois vedettes ont aussi créé un
malaise, et ce n'est pas seulement dans le monde de l'éducation.
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