samedi 14 juillet 2018

IGNORANCE, MENSONGE, IRRESPECT...

Il y a des jours où trop, c’est trop. Il y a des jours où la moutarde nous monte au nez. Ces temps-ci, ça m’arrive trop souvent.  
Les poilus

L’irrespect, d’abord. Radio-Canada a décidé de baptiser une émission estivale sur les animaux de compagnie « Les poilus ». Quand on est ignorant, on trouve que c’est une bonne idée. Quand on est ignorant, on trouve même cela rigolo. Lors de la première Guerre mondiale (la guerre 14-18, pour les ignorants), la France a perdu 1 397 800 militaires, et 4 277 000 autres de ses soldats ont été blessés. Quand on est ignorant comme les producteurs d’émissions de télévision, on ne sait pas que ces soldats français, pendant ce conflit de 1914-1918, s’appelaient « les poilus ».

Ce surnom est apparu parce que les soldats faisaient la guerre essentiellement dans des tranchées. Ils y passaient typiquement sept jours avant d’être relevés. Dans les tranchées, pas question de se laver et de se raser alors que les soldats pataugeaient dans la boue et les déchets de toutes sortes jusqu’aux genoux, sous des bombardements quasi constants de l’artillerie ennemie et la menace permanente des tireurs d’élite. Lorsque les soldats sortaient des tranchées pour aller se reposer à l’arrière du front, leur allure hirsute leur a valu ce surnom de « poilus ». Ce surnom ne fut pas et n’a jamais été péjoratif, bien au contraire. C’est même devenu un titre de gloire que d’avoir été un des poilus français de la Grande Guerre.


Donner le nom de « Les poilus » à une émission de télévision simplette, c’est démontrer son ignorance de l’histoire, et pour une télévision de langue française ici au Québec, c’est faire preuve d’un manque flagrant de respect et de sensibilité historique. Il y a des mémoires courtes qui n’ont simplement pas le droit d’exister.


Bon, je l’ai écrit et oui, ça m’a fait du bien. Je continue.

Désastres maritimes

Jusqu’à récemment à Radio-Canada toujours, on a fait la promotion d’un documentaire qui a été télévisé le 14 juillet. Le documentaire porte sur le naufrage du paquebot de luxe italien Costa Concordia en 2012. La narratrice de cette promotion dit qu’il s’est agi « d’une des plus grandes catastrophes maritimes de l’histoire ».  Bien sûr, c’est totalement faux. Trente-deux personnes ont perdu la vie dans ce naufrage. Trente-deux. De dire que ce naufrage est un des plus grandes catastrophes maritimes de l’histoire est un mensonge éhonté.


Pour mémoire, le Titanic a coulé le 14 avril 1912 au large de Terre-Neuve. Entre mille quatre-cent-quatre-vingt-dix et mille cinq-cent-vingt personnes ont alors perdu la vie. En mai 1914, l’Empress of Ireland a fait naufrage dans le fleuve Saint-Laurent face à Pointe-au-Père près de Rimouski. Mille vingt-sept personnes ont alors perdu la vie. Face à ces vraies tragédies, les trente-deux personnes du Costa Concordia ne pèsent pas lourd. Ces accidents tragiques ont eu lieu en temps de paix.


En temps de guerre, de véritables désastres maritimes ont également eu lieu. Le Lusitania, torpillé en mai 1915, a vu mille deux cents de ses passagers – incluant 94 enfants - et membres de l’équipage périr. En janvier 1945, le Wilhelm Gustloff a été torpillé par un sous-marin soviétique alors qu’il transportait vers l’ouest des soldats blessés et des réfugiés de la Prusse orientale. Neuf mille trois cents personnes ont alors perdu la vie dans les eaux de la Baltique. Est-ce que ça vaut la peine encore de mentionner la bataille maritime du Jutland en mai-juin 1916 ? Wikipedia nous apprend que « les Britanniques ont perdu quatorze navires contre onze allemands mis hors de combat. Du fait que trois de ceux-ci étaient des croiseurs de bataille, leurs pertes humaines sont aussi plus élevées, 6 094 marins anglais contre 2 551 Allemands... »

Alors, entendre une lectrice de Radio-Canada s’exciter à propos d’une « des plus grandes catastrophes maritimes de l’histoire » - le Costa Concordia - quand c’est carrément faux, ça dépasse l’ignorance. C’est un signe d’incompétence crasse dans la tour du boulevard René-Lévesque à Montréal.


Personnellement, je suis passionné de l’histoire et je reconnais que ce n’est pas le lot de tout le monde. Il y a cependant des dates évidentes, des faits majeurs de l’histoire qui ne devraient jamais être oubliés, surtout pas par des gens qui travaillent en information dans un média.


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