mercredi 21 août 2013

QU'EST DONC LE SILENCE DEVENU ?

Le silence n'est plus. La Révolution industrielle, l'invention du moteur à combustion interne, la télévision, la musique pop et rock, tout maintenant se ligue pour éradiquer le silence. Il n'y a plus de silence. Les endroits de silence, de vrai silence, sont devenus rarissimes dans le milieu urbain et péri urbain où la majorité des gens vit aujourd'hui.

Tout concourt au bruit ambiant, et personne n'y fait plus attention. La hasard et mes gènes font que je fréquente souvent, trop, l'hôpital. Je ne le nommerai pas: ils sont tous semblables, à cet égard. Il n'y a pas de chariot ou de civière qui ne bruisse ou ne grince. Les employés, médicaux ou non, parlent fort. On a semé l'horrible, l'affreuse télévision dans tous les recoins et qui montre jour après jour, heure après heure, les mêmes inepties que des gens regardent. J'écris "des gens", car ce ne sont pas tous les gens qui la regardent. Une bonne proportion, dont je fais partie, subit en silence (!) cette intrusion, cette agression visuelle et sonore insipide.

Je me suis enquis au sujet de la prolifération de cette "boîte stupide" (comme l'appellent les Britanniques), la télévision, partout dans les salles d'attente de l'établissement. Il paraît que c'est pour réduire le niveau de stress de la majorité des personnes, patients ou visiteurs, présentes à l'hôpital. Voilà la dictature de la majorité stressée...

À l'extérieur, ce n'est guère mieux. Le bruit de la circulation, les klaxons, les pétarades des motos en été, le bruit de la machinerie lourde dans les chantiers routiers et autres omniprésents, les tondeuses à gazon, les souffleuses de la même pelouse, les marteaux à air comprimé, tout cela crée une cacophonie envahissante. En hiver, nous payons cher les rares moments de silence des petits matins neigeux: le déneigement repose sur les souffleuses à neige individuelles et sur la machinerie lourde des autorités municipales génératrices de décibels assourdissants. Et en milieu rural, les "4X4", motoneiges et autres engins à moteur terrestres et nautiques brisent la quiétude environnante hiver comme été, comme si générer le bruit démontrait que l'on vit.

Évidemment, on ne reviendra en arrière. Mais l'humain a besoin de moments de silence. Pour se retrouver, pour réfléchir, pour se calmer, pour réduire son niveau de stress, pour contempler autre chose qu'un écran.


Aménager des lieux et des moments de silence malgré l'agression de bruit ambiante devient de plus un sine qua non d'équilibre pour chacun. Le défi est personnel et il sera d'autant plus difficile à relever que presque tout, dans notre société de consommation, veut nous éloigner du silence. Car le silence ne vend rien, sinon un peu de bonheur.

mardi 13 août 2013

L'ATTACHEMENT AU CANADA

De l'Alliance laurentienne de Raymond Barbeau en 1957 (qui voulait créer une "République de Laurentie" avec un Québec séparé du Canada) au RIN de Pierre Bourgault en 1960, du Parti républicain de Marcel Chaput en 1962, au Ralliement national de 1966, puis au MSA de 1968, au PQ, aux référendum de 1980 et de 1995, puis à Option nationale et à Québec solidaire, les Québécois ont écouté les messages de ces formations politiques de droite ou de gauche, mais toutes indépendantistes ou souverainistes.

Depuis plus de 50 ans, on reprend chez ceux-ci les mêmes raisons, les mêmes arguments, les mêmes démonstration pour expliquer la "nécessité" de réaliser l'indépendance politique du Québec. On recommence à chaque génération. Et on insiste. Le PQ ayant été porté au pouvoir, on crée même un ministère de la "gouvernance souverainiste", et on traite souvent avec un certain mépris ceux qui ne partagent pas l'objectif sacré de l'indépendance du Québec ("hélas, ils ne comprennent pas"). 

Un billet récent de Jérôme Boucher sur sa foi indépendantiste et les discussion qu'il a suscitées sur le Huffington Post Québec témoignent bien du caractère répétitif de ce débat qui, il faut en convenir, ne semble pour le moment mener nulle part.

Or, je crois que la question n'est plus de savoir pourquoi les Québécois devraient devenir souverains politiquement, mais bien pourquoi les Québécois, qui entendent depuis 50 ou 60 ans cette discussion, ne veulent-ils toujours pas en majorité quitter le Canada

Je pense qu'il y a plus que de la résignation au statu quo comme certains le pensent. Je suis sûr que ce n'est pas de la lâcheté. Il me semble, au contraire, que les Québécois, tout fiers qu'ils sont de leur langue, de leur culture et de leurs réalisations depuis les années 1960, se sentent toujours également des Canadiens francophones ayant leur place et leur rôle dans ce pays immense (le deuxième plus grand au monde après la Russie) que leurs ancêtres français et canadiens, avant tous les autres Européens, ont exploré et ouvert au cours des siècles.

L'indépendance politique du Québec, donc la sécession avec le Canada, constituerait une rupture historique peu banale. Je pense que pour beaucoup de Québécois, ce jeu n'en vaut pas vraiment la chandelle, compte tenu de notre  niveau de vie et de la qualité d'organisation de notre société.

Je ne dis pas que cette majorité de Québécois a raison ou a tort: je dis simplement qu'un certain attachement au Canada plus profond qu'on pense et dont les nationalistes québécois se moquent à la moindre occasion, demeure vraisemblablement plus fort que tous les arguments sécessionnistes avancés depuis la résurgence moderne de ce mouvement à la fin des années 1950. 

C'est cet attachement au pays Canada et ses divers éléments qu'il faut étudier, car c'est celui qui, en définitive, a fait l'histoire du Québec ET du Canada depuis les soixante dernières années, et qui continue de la faire. J'y reviendrai.

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lundi 5 août 2013

OÙ SONT NOS REPÈRES ?


Le gouvernement de Madame Marois a annoncé il y a quelques mois qu'il allait encadrer les "fins de vie" pour ceux ou celles qui auront décidé en pleine connaissance de cause de mettre fin à leurs jours, et que des médecins pourront dans ce contexte alléger des souffrances jugées "insoutenables". Les médecins pourront aussi dire refuser d'agir en ce sens. Nous aurons donc deux sortes de médecins: les "médecins de la mort" (ceux qui accepteront de mettre fin à des vies), et les autres.... Je ne fais même pas d'ironie.

J'éprouve un profond malaise moral et sociétal avec cela. Le plus important des commandements de Dieu était "Tu ne tueras pas". Le crime le plus répugnant est celui du meurtre. La ministre québécoise Véronique Hivon affirme que "la majorité de la population est maintenant prête" pour cet "encadrement" de la fin de vie. Comme si une majorité pouvait décider par vote ou par sondage du bien ou du mal.

Je suis profondément mal à l'aise avec tout cela parce que je crois être moral, parce que je crois que la vie est la chose la plus importante pour qui que ce soit, et que nous sommes jugés par le respect que nous avons envers cette vie. Je suis profondément mal à l'aise avec tout cela parce que c'est un déni d'espoir. C'est une capitulation personnelle et collective.

Personnellement, j'ai demandé à ce qu'il n'y ait pas "d'acharnement thérapeutique" à mon égard, si jamais ma santé se dégradait au point de perdre conscience. Cela dit, je crois comprendre les raisons de gens qui, du fond de leur désespoir, veulent mettre fin à leurs jours. Je les respecte. Mais ce n'est quand même pas une raison pour que l'État, en notre nom à tous, devienne le complice volontaire de leur suicide assisté.

Suis-je le seul à penser ainsi ? Est-ce parce que je suis vieux et dépassé que je ressens ce malaise ? Peut-être, sauf que de dire cela ne fait pas disparaître mon mal d'être face à une mesure que je peine à imaginer et à accepter... Où sont nos repères, s'il en reste ?



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