On me pardonnera de citer Shakespeare en titre de texte, mais sa courte phrase dit tout. Le pseudo faux-pas de François Legault, qui a parlé de la « madame » au lieu de nommer Dominique Anglade, n’est rien. Oh ! Bien des bas de nylon se sont déchirés, bien de petites culottes se sont tordues, mais pour reprendre Shakespeare en bon Québécois, « il n’y a rien là ».
Je regarde se dérouler des élections générales québécoises
depuis 1956. Il y a certes celle de 1952, mais j’avais huit ans et je ne peux
prétendre m’en rappeler vraiment. Mais en 1956, la dernière gagnée par Maurice
Duplessis et l’Union nationale, je me rappelle bien que malgré la domination de
l’UN, la campagne fut féroce. Puis il y a eu 1960 et l’arrivée de Jean Lesage
au pouvoir ; 1962 et la nationalisation de l’électricité ; 1966 et la surprise
du retour de l’UN au pouvoir.
En 1970, Robert Bourassa gagne l’élection pour le Parti
libéral du Québec (PLQ) et le PQ apparaît dans le tableau avec sept députés. En
1973, Bourassa remporte une victoire encore plus convaincante avec 102 députés
élus. Le PQ recule de sept à six députés.
Si je compte bien, là, je suis rendu à six élections
dont j’ai passionnément suivi le déroulement, de 1956 à 1963.
Puis arrive 1976, où le PQ, au grand désespoir du
Canada-Anglais, prend solidement le pouvoir. Malgré son échec référendaire de
1980, le parti de René Lévesque gagne les élections de 1981. En 1985, l’UN étant
disparue du paysage politique, Robert Bourassa et le PLQ remportent la
victoire, succès qu’ils renouvelleront en 1989. Mais en 1994, c’est le PQ de
Jacques Parizeau qui remporte l’élection générale. Malgré une seconde défaite
référendaire en 15 ans, le PQ est réélu en 1998, alors qu’il est dirigé par
Lucien Bouchard.
J’en suis donc, à ce point dans le temps, à douze
élections. Continuons.
En 2003, le PQ dirigé par Bernard Landry, perd aux mains de
Jean Charest et du PLQ. En 2007, Jean Charest est réélu, mais minoritaire, et l’ADQ
de Mario Dumont devient provisoirement l’Opposition officielle à l’Assemblée
nationale. En 2008, Une autre élection reporte Jean Charest au pouvoir et le PQ
redevient l’Opposition officielle, l’ADQ s’étant effondrée pendant cette joute
électorale.
Me voilà rendu à quinze élections, depuis 1956. Ça
commence à faire beaucoup.
En 2012, Jean Charest et le PLQ sont relégués au statut d’Opposition
officielle alors que le PQ prend le pouvoir, mais de façon minoritaire. Pauline
Marois échappe de peu à un attentat à sa vie. Mme Marois déclenche une élection-surprise
en 2014, mais le PQ et elle-même dans son comté sont défaits : Philippe Couillard
et le PLQ retournent au pouvoir. En 2018, le PLQ est littéralement chassé du
pouvoir par la Coalition Avenir Québec (CAQ), parti fondé en 2011 par François
Legault et Charles Sirois. M. Legault devient premier ministre. Enfin, cette
année en 2022, nous voilà encore en campagne électorale.
Si je ne me suis pas mêlé, c’est donc la 19ème campagne électorale provinciale à laquelle j’assiste maintenant.
Évidemment, comme tout le monde, j’en ai entendu des promesses électorales, des
engagements de toutes sortes au fil des élections. Ce qui fait qu’aujourd’hui,
tout ce que les candidats en lice lancent dans l’air du temps pour ramasser
quelques votes par ci, quelques votes par là me coule sur le dos comme de l’eau
sur le dos d’un canard.
Alors vous comprendrez que l’utilisation par François Legault
du mot « madame » dimanche, ça ne me fait pas un pli sur la différence. Entre
la « madame » et l’inflation ou la crise du logement, disons que j’ai appris,
avec le temps, à donner de l’importance aux vrais enjeux.
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